Chirurgien par obligation familiale, Léopold Chauveau (1870-1940) s’est réfugié tardivement en autodidacte dans un univers artistique étrange et singulier. Ses premières sculptures datent de 1905, à un moment où il côtoie le peintre et sculpteur nabi Georges Lacombe, et ses dessins de 1910 à 1919. Sa rencontre avec de nombreux écrivains, dont André Malraux, le pousse à réaliser de nombreux livres en tant qu’écrivain (Bonnard va illustrer un de ses livres) ou comme auteur complet où il inclut l’enfant dans la lecture en proposant d’abord le texte puis des illustrations avec des légendes. Il se décrivait lui-même comme un vieux petit enfant.

Il faudra un livre de Jacques Poirier et des donations de sa famille pour que le musée d’Orsay propose une exposition de 465 dessins, 48 sculptures de monstres (qu’il réalisait en réponse à ces corps malades qu’il détestait toucher du temps où il était médecin) et archives liées à sa production artistique. Inspiré par Bosch, Brueghel et les gargouilles médiévales, Léopold Chauveau propose des monstres sympathiques, souvent sur des fonds de couleurs très marqués. En regardant son travail, si on pense à Maurice Sendak, Glen Baxter ou Roland Topor, c’est plutôt vers l’art brut que l’on penche. Comparez seulement ses œuvres aux dessins du Français André Robillard ou du Suisse Josef Wittlich.

Pour cette exposition, le musée d’Orsay invite des illustrateurs contemporains comme Grégoire Solotareff, Dorothée de Monfreid et Anthony Browne à travailler sur cet univers, la palme revenant à Claude Ponti qui introduit des monstres de Chauveau dans une histoire inédite que le musée édite. Notons aussi que trente étudiants de l’école des Gobelins réalisent des films inspirés de l’univers de Léopold Chauveau qui seront bien évidement projetés pendant la durée de l’exposition. Nous avons hâte de découvrir tout cela in situ…

par Frédéric Bosser, publié dans le numéro 10